L'idée du curare ne plut pas à Bertram, vu sa réaction, mais de toute façon, ce n'était qu'une blague, je ne comptais pas le faire, nous étions une entreprise sérieuse et cette opération risquait de dévoiler l'existence des vampires au grand jour. Ce serait stupide de mettre ma vie en danger de cette façon, au risque d'augmenter le nombre de chasseurs qui souhaiteraient nous éradiquer...
Cependant, je ne m'attendais pas à ce qu'il se lève aussi brusquement, avec cet air un peu tendu, m'annonçant qu'il allait prendre un bain comme s'il me laissait en plan en rompant une conversation que le fâchait sans doute. J'étais un peu surpris par cette réaction intempestive, mais il fallait que je prenne en compte que nous n'étions pas dans notre état normal et il était fatigué, fiévreux, je le voyais dans son regard brillant. J'ouvris la bouche pour dire quelque chose, mais elle se referma presque aussitôt, pour me retenir de sortir une connerie ou alors pour ne pas aggraver la situation. Mais je n'aimais pas le voir dans cet état, je ne pouvais seulement rien dire...
Abandonnant de la même façon ma pizza dans son carton, que je posais sur celle de mon frère, j'écoutais les bruits que celui-ci faisait dans la salle de bain, l'eau qui coule, mes vêtements qui tombent, ou tout autre, et je réfléchissais en même temps. Oui je réfléchissais à comment faire en sorte de... je sais pas... le calmer, me faire pardonner... Je ne savais plus trop, et parler de vive voix, ce n'était pas mon truc... Il ne me restait qu'un seul moyen...
M'isolant dans ma chambre pour une fois propre, j'avais éteint la lumière du salon, pour me plonger dans l'obscurité de l'appartement, la seule luminosité provenant des étoiles et de la Lune dont les éclats traversaient la fenêtre de la chambre. Du bout de mon doigt que je venais de percer à l'aide d'une canine, le sang esquissa quelques voluptés dans l'air, traçant des lettres floues, pour enfin reproduire mon écriture arrondi et s'en alla à l'endroit que je désirais, c'est-à dire dans la salle de bain... Quelques lettres qui voulaient exprimer tant de choses.
Désolé...
Mes yeux se fermèrent lentement et mon corps s'alourdit dans mon lit, resserrant machinalement mon oreiller contre mon crâne, m'emmenant sur le chemin de l'inconscience totale, sans rêves...