Secret square, un nom prometteur, un nom brûlant sur des néons rouges au coin d'une rue paisible. Il m'était arrivé plusieurs fois de regarder distraitement cette enseigne, du haut du balcon. Secret Square, gentlemen's club. Un nom plutôt joli et mystérieux pour ce genre d'établissement. Mais ce n'était pas cela qui avait attiré mon attention. Ce genre de club, au milieu d'un quartier résidentiel ? Ca m'avait paru bizarre. Ce genre de chose ne se produirait jamais chez moi. Ou alors pas ouvertement de cette façon, avec les néons, la musique et tout le tralala. Les gens se plaindraient. La décadence des moeurs et tout ça...

Il faut croire que les terrariens s'en fichent. Ou bien qu'ils sont particulièrement friands de ce genre d'endroits récréatif.

J'avançais, ou plutôt je suivais à contre-coeur F347, qui me précédait fièrement et plein d'enthousiasme, à l'instar d'un gamin qu'on emmenait au cirque. Il n'avait jamais été dans ce genre d'endroit. Je pouvais comprendre sa curiosité mais...on entrain avait quelque chose de ...limite malsain vu de l'extérieur.

Quoi qu'il en soit, nous passions facilement devant les deux gorilles qui gardaient l'entrée et nous pénétrions à l'intérieur de l'établissement. Une musique dynamique et assourdissante nous accueillit dès l'entrée, ainsi qu'une vue de choix sur la piste qui s'allongeait plus loin et du numéro en cours. Une longue scène, décorée de pole dance et d'une jeune femme déjà peu vêtue qui dansait et jouait sur le rythme de la musique.

L'intérieur embaumait un odeur particulière, un parfum synthétique  qui devait venir de diffuseur ou bien de l'huile ou du maquillage pailleté qui couvrait les danseuses. Il n'y avait pas de fenêtres pour nous empêcher de se rendre compte du temps qui passait à l'extérieur. La décoration était majoritairement rouge et noire, pour une ambiance feutrée mais un peu trop rococo à mon goût.

Sur les tables et les fauteuils près de la scène se trouvait les clients. Des habitués, des riches chauves et bedonnant, des hommes d'affaires en recherche de sensations, des jeunes plus curieux et plus timides, et un groupe d'hommes relativement bruyant et alcoolisé qui devaient fêter quelque chose comme un enterrement de vie de garçon. J'esquissais un faible sourire. Oui, moi aussi, j'avais été à leur place un jour.
Les serveuses arboraient des costumes qui ressemblaient fortement à une lingerie féminine affriolante. J'imaginais qu'il s'agissait de danseuses également.

Mon regard balaya tout cela. Contrairement à mon compagnon, je ne me sentais pas très à l'aise dans ce genre d'endroit. C'était un peu...embarrassant. Dans ma quête d'éviter la scène et l'attention des danseuses, mon regard perçant, repéra quelques places de libres a comptoir du bar. Je m'avançais criant un peu pour que F347 puisse m'entendre :



Mais c'était sans compter sur sa volonté de me voir m'amuser, puisqu'il me rattrapa par le bras et me traîna avec lui vers les places disponibles le plus près de la scène. Il observait la fin du spectacle avec des yeux brillants. Moi j'ai lancé à regard à la danseuse, qui certes, connaissait bien son travail, vu la façon dont elle utilisait ses courbes généreuses pour danser et aguicher les clients. La musique, la lumières, le maquillage, tout contribuait à la rendre plus désirable, une vision de rêve érotique qui se déroulait là sous nos yeux mais que nous ne pouvions pas toucher. Elle ne laissait pas un seul homme dans cette salle insensible.

A part moi, bien sûr.

Je la regardais avec lucidité et pas la moindre pointe de désir. Mon désir charnel s'était éteint depuis un moment. J'avais fait quelques tentatives désespérées pour essayer de stimuler mon désir sexuel, de peur de le perdre à tout jamais. Toutes s'étaient soldées par un échec. J'étais incapable de ressentir ce besoin physique. J'étais bloqué. Impuissant. Etouffé par la culpabilité, la honte ou le dégoût de moi-même je ne savais pas. Tout ce que je savais c'est que ma libido était éteinte.

Alors, quand je la voyais se dandiner sur scène, je ne voyais rien de spécialement attirant. Tous ses talents étaient dirigées pour exciter la testostérone, activer le désir sexuel. Je la regardais comme on regarde un porno après s'être satisfait. La magie n'était plus là. Je n'avais plus d'envie. Je ne pouvais voir que tout ce qui clochait.
Heureusement, une serveuse vint rapidement me sauver de mon ennui, nous demandant ce que nous souhaitions boire.

- demandais-je de façon assez formelle.

Au moins je pouvais tenter de me détendre avec un verre. Mais un seul. Une longue journée m'attendait demain. Et je pressentais que la soirée risquait d'être longue... D'un geste je sortais mon téléphone pour vérifier mes mails. Toujours rien. C'était inquiétant.

 Ce n'était pas que je détestais cet endroit...L'établissement avait l'air bien tenu, le règles étaient apparentes ici et là, mais de façon discrète...A l'exception du troupeau de jeunes hommes ici pour un brûlage de pantalon, la clientèle semblait décente. Un peu triste, mais décente. Et puis...ça avait l'air propre. S'il n'y avait pas cette musique assourdissante, ça aurait pu être sympa comme bar. Juste un bar. Mais non, il fallait qu'ils mettent ses filles en décorations, il fallait que je me sente oppressé socialement, que je me sente défaillant...Je sais ce que j'étais censé ressentir, j'avais fréquenté ce genre d'endroit une fois auparavant. J'étais censé être embarrassé mais également...sexuellement stimulé. Mais cette partie de moi était morte depuis un moment, et je ne pouvais pas faire semblant.

En revanche, F347, enfin Freyr, semblait bien s'y plaire. Pas étonnant. C'était censé être le rêve de n'importe quel homme alors si le dieu de la virilité en personne venait s'inviter...Ca devait forcément faire des étincelles. J'ai brièvement regardé son visage, ou plutôt son masque, imprimé sur le visage de F347. C'était si saugrenu. Ludwig n'aurait jamais été capable de mettre les pieds dans ce genre d'endroit, il en serait mort de honte et d'anxiété. Et pourtant son corps s'y baladait avec le plus grand plaisir, et sans le moindre scrupule. On pouvait remarquer à l'oeil nu qu'il ne boudait pas son plaisir...

Dégoûtant.

Mais une fois de plus, c'était comme proposer de l'alcool à quelqu'un en pleine gueule de bois. J'étais physiquement dégoûté, sans vouloir insulter personne.

Et quand la serveuse arriva, l'ardeur de mon compagnon ne ralentit pas au contraire. Il posa un regard sur elle....Un regard répugnant. Un regard avide et lubrique et sa voix...Sirupeuse à souhait comme je le détestais. Ce qui était étonnant en revanche, furent les mots qu'il avait employé pour tenter de séduire l'hôtesse. C'était la pick-up line la plus merdique et inefficace qui soit, mais je lui donnais un point pour l'originalité et l'intensité de la performance.

Malheureusement ses dons de séductions n'impressionnèrent pas l'hôtesse, qui devait avoir l'habitude de se faire draguer stupidement à tout bout de champ. Je fis mine de tousser pour ne pas rire et ne pas offenser notre divinité, je craignais toujours de voir cette lame sous ma gorge. Dépité, mon colocataire se résigna et commanda une boisson dont je n'avais jamais entendu parler et la demoiselle emmena son joli petit cul ailleurs.

C'est alors qu'il m'interpella, me demandant s'il était possible d'obtenir plus que ce simple spectacle. Je poussais un soupir. Evidemment...j'en aurai encore pour longtemps.



Il suffisait probablement de demander. En tout cas dans la cité orientale, c'était comme ça que ça fonctionnait. Mais bon je n'étais pas un spécialiste et pour être sûr d'éviter les malentendus, je lui rappelais :




Je pointais du doigt un des écriteaux disposés de ci et de là aux alentours de la scène. Le message se répétait en boucle, rappelant à l'ordre les clients aux  mains un peu trop baladeuses. En cas d'abus, les deux gorilles de l'entrée se feraient certainement un plaisir de nous montrer le chemin de la sortie. Personnellement je ne tenais pas particulièrement à me faire brutaliser. Je ne tenais déjà pas à me trouver ici. Je vérifiais mes mails quand  un exclamation et les sifflets des spectateurs me firent vaguement relever la tête, constamment que la charmante demoiselle venait d'ôter son haut, signe que ce serait la fin de sa danse et qu'une autre viendrait lui succéder, sur une musique différente.  

Je la regardais comme si elle était transparente, perdu dans mes pensées et mes soucis. Toujours pas de nouvelle de la direction....Et s'ils n'avaient pas reçu mon mail ?Je baissais les yeux, et je fronçais les sourcils, préoccupé. Jusqu'à ce qu'une main étrangère viennent se poser sur ma cuisse et y glisser en remontant, causant une légère friction.

Nom de dieu, j'ai regardé cette main avec surprise et horreur, de la même façon que si on m'avait jeté une tarentule venimeuse sur le pantalon. Je vous le jure, j'ai cru que mes yeux allaient sortir de mes orbites. J'arrivais à peine à le croire. Et la façon lascive dont il me regardait, et la façon sirupeuse dont il me parlais. J'ai dû rassembler tout mon self-control pour éviter de lui mettre mon poing où je pense. J'ai attrapé sa main avant qu'elle n'aille trop loin et je lui ai rendu brutalement, serrant les dents pour ne pas crier et attirer l'attention.



Je lui lançais un regard noir, articulant sèchement chacune de mes syllabes. Heureusement j'étais sauvé par le gong, la serveuse trouva le moment opportun pour nous apporter nos boissons. Je la payais et je m'emparais de ma bière, avalant une longue gorgée avant de regarder ailleurs, énervé et humilié.
Et dans ma tête ça allait bon train. Et qu'est ce qu'il pense ce pervers ?! Comment ose-t-il se permettre de me toucher de cette façon. Quoi ? Il pense que je suis gay ? Est-ce qu'il est ? Non, il n'est même pas censé l'être...Ou alors quoi...Il sait quelque chose ? Il essaie de se moquer de moi ? De me déstabiliser ?!  Quel total manque de respect...Quel...individu répugnant...

J'avais envie de partir, mais je ne pouvais pas le laisser sans surveillance, cruelle ironie du sort.

Je crois que c'est dans cette ambiance étrange et lubrique, avec ces lumières et cette musique, c'est à ce moment là que Ludwig m'a manqué le plus. Ce genre de chose ne se serait pas produite avec lui.

 Qu'est ce qui n'allait pas chez ce mec ? D'accord, je pouvais comprendre qu'il ne s'agissait pas de n'importe quel âme, de n'importe quelle énergie. On venait le réveiller dans un monde à des années lumières du sien. Mais tout de même....N'avait-il pas tout observé à travers les yeux de Ludwig pendant près de deux mois ?! Ne pouvait-il pas réfléchir deux secondes sur ce qu'il pouvait et ne pouvait pas faire ?! Et regardez-le là, avec ce sourire concupiscent, l'éclat lubrique dans son oeil, et sa voix mielleuse ? Eurk...Quand je pense qu'il avait osé poser ses mains sur moi de cette façon...

Et vous appelez ça un dieu ? Cet être qui n'avait rien à envier aux autres clients de la pièces. Tous fixaient de leur regards libidineux les danseuses et les serveuses, le visage gras de désir. Et quel désir ? Le plus bas de tous, le plus bas de tous les instincts. Le désir de la chair sous la forme la plus primale et la plus brutale qui soit. Les femmes ne sont pas des déesses, ni des personnes à leur yeux. Juste des personnes qu'il souhaiteraient prendre, utiliser, et rejeter par la suite. Un dieu...ne devrait-il pas être au delà de ce de préoccupation mortelle ? Ne devrait-il pas être au dessus de ces considérations triviales et sordides ?  

Au simple contact avec sa main j'ai senti mon corps se raidir...de dégoût bien sûr. Non, je n'avais pas envie de me relaxer. Oui j'étais coincé et alors ? Si ça vous fait plaisir ... J'avalais des gorgée de ma bière, plus pour faire passer ma rage que pour me détendre. Qu'est ce qu'il pensait que j'étais gay ? Non mais....

Mais....je ne veux pas que mes erreurs continuent à me suivre. C'est pour ça que je suis venu ici. Pour tout recommencer à zéro. Pour échapper à leurs regards et à leur ressentiment. Et lui, d'une certaine façon, il s'en foutait. Il aurait pu tenter de faire pareil, tout détruite. Savait-il ? Etait-ce un clin d'oeil à mes déboires précédents ? Non ce n'était pas possible, personne ne savait rien. Ni Ludwig, ni F347, ni lui. Personne.
Sa voix attira de nouveau mon attention.

Etouffe-toi avec ton hydromel

Et pourtant, pendant une fraction de seconde, j'hésitais. Avait-il vraiment déviné que j'avais un blocage ? Pouvait-il le voir où le sentir ? Etait une proposition sérieuse pour m'aider à retrouver ce que j'avais perdu ? Ou bien juste les paroles d'un homme prêt à tout pour se taper quelqu'un ce soir, et satisfaire ses pulsions les plus dégoûtantes et les plus primaires ? Je fronçais les sourcils.

Et si en un claquement de doigt il pouvait régler ce petit souci ? Je pourrais ... atteindre l'illumination à nouveau....

.........

Non. Il n'y avait pas moyen que je lui dise. Même s'il le pouvait. C'était forcément juste une stratégie pour me faire enlever mon pantalon. Je masquais mon déplaisir et je répliquais d'une voix normale, quoi qu'un peu cynique.




Ou comment lui glisser un indice subtile sur la façon inappropriée  dont il m'avait traité. Je ne sais pas pourquoi, mais j'espérais qu'il comprendrait ce que je voulais dire. Au pire, c'était un bon moyen de lui rappeler que la terre ne tournait pas autour de lui ou que nous n'étions pas de misérables serviteurs dont il pouvait disposer comme bon lui plaisait.

Il vida son verre à une vitesse impressionnante et en recommanda un autre. Moi je demandais un soda. Nous étions censé nous rendre au labo demain, autant que l'un d'entre nous soit sobre.

- lui rappelais-je pour qu'il diminue un peu sa consommation.

Mais pourquoi m'aurait-il écouté ? J'ignorais si F347 avait l'habitude de boire, ni même s'il tenait bien l'alcool. Mais avec cette espèce de Dyonisos nordique dans le corps, il allait bien falloir. Je doute que Freyr ne compte se limiter à de la grenadine. Tout ce que je pouvais espérer c'est qu'il ne se réveillerait pas avec la gueule de bois demain...De toute façon je ne pouvais pas légalement l'en empêcher. Il était assez âgé je pense pour agir de façon responsable.

Quand il se pencha vers moi pour me poser la question, je pouvais remarquer son oeil avait rougi, tout comme sa peau et que sa façon de parler avait légèrement changé, sans doute à cause de l'alcool. Et ça ne présageait rien de bon. J'inspirais, je prenais sur moi et je répondais poliment :



Je poussais un soupir.




Je poussais un soupir, priant je ne sais quelle divinité qui aurait pu me sortir de là, m'octroyer quelques heures, ou même quelques minutes loin de ce pervers sexuel. Et mes prières furent entendues. Dans ma poche, mon téléphone vibra. Le directeur du labo lui même m'appelait. Je sortais l'appareil de ma poche et je bredouillais une excuse à mon compagnon avant de me précipiter vers la sortie pour décrocher, loin de la musique ambiante.

 Mes sentiments vis à vis de ce coup de fil étaient plutôt conflictuels. D'un côté je l'accueillais comme le messie, miracle qui me permettait de fausser compagnie à F347 pendant de précieuses minutes durant lesquelles je ne devais pas supporter  sa présence. Mais d'un autre côté, je sentais les paumes de ma main s'humidifier, à l'idée que ce coup de fil puisse être celui qui m'annoncerait de mauvaises nouvelles. Quoi qu'il en était, je ne pouvais pas reculer l'inévitable davantage, et je décrochais.

C'était le directeur du labo au bout du fil. Il m'expliqua qu'il avait bien reçu mon mail, ainsi que mon rapport. Sa voix était toujours la même, calme, polie, assez agréable à entendre. Mais il ne fallait pas s'y fier. Il était capable de virer un employé, et demander un pomme à la cafétéria sur le même ton relativement désinvolte. Je déglutissais donc difficilement, tentant de desserrer davantage le noeud de ma cravate qu'il l'était déjà, alors je chipotais machinalement le premier bouton de mon col pour passer mes nerfs, restant dans l'expectative.

Il me confirma qu'une réunion particulière allait être tenue demain matin, dans la salle B1 du 5ème étage, et que je devais impérativement m'y rendre - puisqu'il allait me donner de nouvelles consignes, et discuter des résultats avec les autres membres du comité. Je me sentais soudainement mal. Peu importe sous quel angle , je le regardais, ça n'annonçait rien de bon pour moi. J'essayais de maîtriser ma voix, expliquant que je devais faire passer des tests au sujet demain matin. Il m'interrompit. Il s'était déjà occupé de trouver quelqu'un pour le faire à ma place.


Il me rendit la pareille et je raccrochais. J'avais une drôle de sensation dans la poitrine, du stress. Je ne savais pas ce qui allait me tomber dessus, mais je le sentais venir,  à 3000 kilomètres heures et ça ne sentait pas bon pour moi. J'avais vraiment essayé pourtant...j'avais vraiment travaillé dur, j'avais essayé de faire en sorte que tout se passe bien...Mais les résultats sont les résultats n'est-ce pas ? Essayer ce n'est pas suffisant. Il faut réussir et de toute évidence j'avais échoué.

Peut-être qu'ils m'affecteront ailleurs, là où je serai vraiment utile ? Je poussais un long soupir, regardant vaguement la porte d'entrée. Je n'avais pas envie de retourner là-dedans et de retrouver Monsieur le pervers au sexe aussi impatient qu'un petit chien qui attend qu'on l'emmène en ballade. Non. Vraiment pas. Alors je profitais de l'occasion et de l'absence de fenêtre pour sortir une cigarette et savourer chaque bouffée de poison qui s'infiltrait dans mon corps. J'observais, rêveur, la fumée grise et odorante s'élever dans les airs et disparaître vers la voûte déjà étoilée.

Ca c'était jusqu'à ce qu'il y ait du grabuge à l'intérieur et que les gorilles de l'extérieur décidèrent de s'en mêler. J'imagine que je n'aurai pas dû être surpris de voir mon cobaye se faire jeter dehors comme une chaussette sale. Ce qui l'était plus, en revanche, c'était qu'il était en slip. j'écrasais rapidement ma cigarette à moitié consumée de peur qu'il ne la remarque et qu'il manque son coup, cette fois. J'observais le corps pâle de F347 se faire rhabiller, alors qu'il rigolait. Il riait ? Pourquoi ? Il venait de se faire jeter dehors ...? Je m'apprêtais à lui faire une remarque quand il se mit à tituber, et à régurgiter le contenu de son estomac contre le mur, en grands jets couleur jaune vomi.

Charmant.

De toute évidence, il était mort torché. Il se tourna vers moi, la bouche encore sale, en souriant. Il souriait?!! Et balbutia des absurdités, les clôturant par un hoquet si évident que s'en était presque caricatural.

- ironisais-je, sans sourire toutefois.

C'était une forme de dégoût qu'on pouvait lire sur mon visage.



Vous êtes fier de vous ? Vous me donnez envie de gerber.

Comment pouvais-je avoir un quelconque respect pour cette personne ? Lui, une divinité ? Lui le divin, le sacré, l'idéal, la perfection ? Et bien si c'était ça, je préférais rester humain, imparfait bâtard de la création. Mais c'était de cette épave dont je devais m'occuper. Alors je l'attrapais par le bras et je le menais sans ménagement et sans répit vers notre lieu de repos.



Je sais que normalement j'aurai dû me taire, ne pas manquer de respect à une divinité au risque de me prendre une lame sous la gorge. Mais je ne pouvais pas. La journée avait été longue, et lui avait été loin d'être raisonnable. Il fallait qu'il apprenne. Il fallait qu'il comprenne. Et tant pis si je tempêtais pour rien. Tant pis si ça rentrait par une oreille et si ça sortait par une autre. Ca avait le mérite de me défouler.



Arrivé à la maison, je le laissais vomir de tout son saoul avant de le médicamenter et de l'envoyer au lit sans repas. De toute façon son foie n'aurait pas pu supporter autre chose que de l'eau. Ca allait être drôle demain...