Doux parfum de l'hiver, en cette vallée de Terraria, sans neige, que quelques flocons qui s'éparpillent dans les airs, sans jamais ne se collent au sol, inondant d'un blanc manteau la verdure brillante des jardins publics. Les fleurs restent entretenues, malgré la saison froide, comme si elles étaient éternelles. Freyr me souffle au creux de l'oreille qu'il doit s'agir de magie, je le crois, mais je reste interdit devant leur beauté.

Dieu de la vie, dieu de l'amour, dieu de la fécondité, qui est réellement celui qui habite en moi ? Il a ces dons qui m'émerveillent et m'effraient à la fois, mais il râle de ne pouvoir atteindre sa pleine force dans mon corps. Jalousant quelque part sa propre soeur qui possédait son corps et la totalité de ses dons, sans l'avouer vraiment, il m'a déjà fait part de ses capacités de l'époque, lorsqu'il était reconnu et choyé par son peuple. Un peuple aujourd'hui disparu. Après, je ne sais situer où est la vérité dans ses récits, car j'ai le sentiment de vivre en pleine mythologie.

Il soupire parfois, en scrutant la pauvre fleur qui a du mal à survivre à l'appartement, elle a tendance à tirer la gueule, par manque de soleil, peut-être, parce que nous en prenons grand soin tout de même. Freyr me disait qu'il fallait leur parler, les aimer comme des êtres humains. Je pensais surtout qu'il lui fallait de l'engrais, ou un truc du genre.

Voilà la raison de ma présence ici. Le fleuriste de Terraria était réputé pour ses fleurs rares et sans beauté égalée. Ils devaient donc bien posséder un remède miracle, mais j'avais peur que cela ne soit excessivement cher, pour mes maigres moyens pour l'instant.

La clochette sonna sur mon entrée, mais il n'y avait encore personne au comptoir. La personne qui gérait devait être dans l'arrière boutique en train de préparer des commandes de bouquets sans doute, cela me faisait repenser à l'époque où je travaillais en herboristerie avec Freya, la jumelle de ma divinité. C'était le bon temps si seulement elle ne m'avait pas laissé un cuisant souvenir en disparaissant du jour au lendemain... En tout cas, ça me laissait le temps de scruter un peu les articles et surtout leur prix... que je ne trouvais pas si excessif que ça finalement !

Une personne arriva enfin, j'entendis sa voix et mon regard se tourna vers elle. Mais aussitôt qu'ils avaient capté sa silhouette, Freyr me repoussa brusquement en arrière pour prendre le contrôle de mon corps et lui sauter sans préavis dans les bras, l'enlaçant sans demi-mesure et l'embrassant dans le cou avec tendresse en s'exclamant :



C'est vrai qu'elle lui ressemble, mais sa réaction à elle semble... comme si elle ne nous connaissait pas. S'agit-il vraiment de Freya ? J'ai comme un doute, mais maintenant qu'il s'était élancé, c'était trop tard, la surprise de sa réaction m'avait empêché de réagir.

Tu te sens repoussé, surpris par sa réaction contraire à tes habitudes. Evidemment Freyr, ce n'est pas Freya ! Je m'en suis rendu compte à sa réaction, mais toi, tu n'as rien compris tant l'espoir de la revoir te hante. Alors, tu fais un pas en arrière, tu la dévisages des pieds à la tête, comme si elle venait de te mettre une claque dont tu ne comprends pas la raison. Tu es estomaqué par sa révélation et tu fronces les sourcils, cherchant un moyen de te sortir de cette situation.

Non, je me trompe, tu n'essaies de te sortir de cette situation embarrassante pour les humains que nous sommes, elle et moi, mais tu souris, stupidement, et acceptes de la garder encore un peu dans tes bras, les mains gardant leur emprise sur ses coudes, sans pour autant la serrer et lui faire mal, tu désires juste garder le contact.



Et comment est-il possible d'en arriver là ? Je serais toujours choqué par ton sens du burlesque. Ce n'est pas du tout ce qu'il faut faire et je lui glisse dans ses pensées la démarche à opérer, au lieu d'aggraver la gêne et de se faire virer de la boutique. J'ai besoin de mon terreau, zut !



Et il faut noter aussi qu'en tant que jumeau, comme tu le dis, je ressemble pas des masses à Freya. Donc, très crédible comme définition, on va se faire prendre pour des fous, oui. Et je ne peux même pas prendre la place pour lui dire, pour arranger les choses, ça empirerait la situation... J'ai tellement du mal à me faire passer pour lui et vice versa. On est encore loin d'avoir les mêmes réactions, même si parfois, on se rejoint sur de plus en plus de points. Alors je lui souffle toute la démarche. Mais il a l'air d'avoir du mal.



Juste à temps, je plaque ma main sur la bouche. Putain, ce qu'il peut être con parfois ! Voilà que je reprends le contrôle de mon corps, sentant mon coeur battre à tout rompre. Je me détends, reprends mon souffle et souris d'un air gêné en passant la main derrière la nuque nerveusement, m'excusant pour "mon" comportement.



Je la scrute à mon tour et je remarquais d'un murmure :



La gêne m'envahit subitement, me rendant (enfin) compte de la situation embarrassante dans laquelle Freyr m'avait embourbé. Mon teint passa au rouge et je reculais d'un nouveau pas, en bégayant encore :



Non, ce n'est pas une technique de drague, la demande est totalement désinteressée... Bien que Freya ne me laissait pas indifférent non plus, mais c'était l'idée d'une relation fraternelle déviante qui me gênait... Freyr et Freya avait une drôle de façon de s'adorer...