De nature curieuse, Sylan n’hésite pas à essayer de comprendre le pourquoi du comment. Réticent à partager sa vie privée ou son passé, il refuse, la plupart du temps, de se lier à qui que ce soit, aussi de peur de l’influence que l’environnement peut avoir sur soi. Motivé par l’argent, il va là où il le flaire, indépendamment de l’origine ou de l’organisation associée à son employeur. Il fait le boulot sans poser (trop) de question. D’un calme olympien, limite froid, il n’hésite pas à remettre les gens à leur place ou à être gratuitement cinglant avec eux. Il vit sa vie, autant que faire se peut.

Régulièrement, son comportement change du tout au tout, suite à un trauma, une émotion forte ou une situation particulière, devenant soudain belliqueux, haineux, agressif et encore moins agréable. Quand il est comme ça, il aime bien casser des os. Et brûler des trucs. Il paraît que ça le détend, mais on n’en voit pas beaucoup les effets. D’ailleurs, ceux-ci se dissipent soit au bout d’un certain temps, soit suite à une blessure ou un évanouissement (la mort peut-être efficace aussi), soit quand la source de ce changement a disparu.

Finalement, Sylan est quelqu’un sur qui on peut compter, pour un temps au moins, mais n'espérez pas avoir un compagnon de voyage très agréable, et évitez de rester près de lui dans des situations trop compliquées, ça vaut d’ailleurs pour toute machine à tuer. Sylan est instable, pas ce qu’il y a de plus aimable, mais il fait son boulot, lui en demandez pas plus.

Dr Saudron, rapport A0 du projet FR/RM.
Le sujet se nomme Sylan Anderson. Il est né et a grandi à Froënbourg dans une famille d’Humains somme toute normale. Le père est ouvrier et la mère boulangère, aucun n’a d’antécédent notable.

Le sujet a mené de longues études. Possesseur d’une licence d’histoire, qui semble être sa passion, il a aussi, et surtout, un master en psychologie, et est professeur à l’Université de Froënbourg en Neuropsychologie. C’est ceci, couplé avec ses excellents résultats et sa bonne condition physique, qui a orienté notre choix pour ce Cobaye. Il y a une semaine, nous l’avons enlevé après l’avoir drogué afin de l’enfermer dans une chambre spécialement faite pour l’occasion. Elle fait 6m² et est équipée d’un lit simple légèrement trop petit pour le sujet, d’une télévision diffusant le programme que nos scientifiques choisissent, d’un tableau que nous changeront toutes les deux semaines, d’un simulateur d’épée longue en nylon (nous tenons à ce que le sujet se tienne en forme, sachant qu’il maniait déjà cette arme auparavant), trois caméras et enfin de petites bouches d’aération, renouvelant l’air ou diffusant des drogues.

Le projet est le suivant : nous le tiendrons captif durant cinq années. Jamais il ne sortira, du moins consciemment, de cette chambre. Grâce aux gaz, nous l’éveillerons à 6h du matin et l’endormirons à 23h le soir. Il aura deux repas par jour : un à 6h30 et un à 18h30, que nous passerons par la trappe hermétique de la porte d’entrée. Le menu sera bien défini selon certains critères. Enfin, à la fin de chaque semaine, nous ferons prendre une douche au sujet sous sédatif et lui ferons une batterie de tests. Le principe de l’expérience est de modifier certaines de ces configurations afin d’impacter en conséquence ses émotions. Pendant toute la durée du projet, il passera ainsi par de nombreux états, provoqués ou naturels, que nous étudierons via les tests susdits et les enregistrements vidéo. Ainsi nous le connaitrons si bien que nous pourrons prévoir toute réaction, via le calcul et les confirmer par expérience. C’est à ce moment que nous pourrons passer à la seconde phase du projet : la manipulation de ses émotions. Notamment grâce aux drogues, nous le ferons passer par des cas extrêmes. Tout ceci a pour but de créer un programme parfait prédisant ses réactions, via ses émotions, et le manipuler en conséquence selon nos désirs. Il sera l’hôte du prototype de puce électronique que nous mettons au point en ce moment même : la puce dite « FR/RM » ou « Feelings’ Reader & Reactions’ Manipulator ». Pour finir cet exposé, notre but est d’en faire une arme pour MbM, une machine capable de tuer selon les ordres que nous lui communiquerons, de manière indirecte, via cette puce. Pour qu’il en soit capable, nous en ferons aussi un Holder, un Holder de feu. La création de Holder sur un sujet déjà adulte est rare, mais pas impossible, tout devrait, alors, bien se passer.


Dr Saudron, rapport Z0 du projet FR/RM.
Cela fait exactement cinq ans que le projet a commencé, et il est, aujourd’hui, officiellement terminé. Nous avons endormi le sujet il y a quelques minutes, et une équipe s’occupe en ce moment même de l’habiller, lui fournir assez d’argent pour survivre pendant un mois, pour ensuite aller l’installer dans un de nos appartements meublés à Froënbourg. Comme vu dans les quatre rapports précédents, la puce FR/RM fonctionne à merveille, au-delà des espérances même. Quand elle est active, le sujet change du tout au tout et nous sert ainsi, selon nos désirs inscrits dans le programme de la puce. Le projet touche alors à sa fin et tout est parfait, mais j’aimerais tester en même temps un autre programme, couplé à celui-ci, si le sujet passe la période de test du mois à venir…



Que s’est-il passé ? Bordel, ça fait une éternité que je suis enfermé dans une pièce et du jour au lendemain, je me retrouve dans un lit, en ville !? Bien que ça fasse 12 heures (je suis tellement heureux de pouvoir retrouver la notion du temps que j’en deviens accro) que je me suis réveillé, ici, je ne m’en suis toujours pas remis. Ce matin, le soleil m’a brûlé la rétine, à tel point que je n’ai pas pu ouvrir les yeux pendant une dizaine de minutes. Je découvris alors la pièce dans laquelle j’étais à tâtons, avant de pouvoir l’observer enfin. Les gars qui m’ont capturé, je suppose, m’ont en plus donné un paquet de thunes, alors je me suis fait plaisir. J’ai mangé dans le meilleur restau de la ville, adieu les plats pourris réchauffés qu’on m’a tant servi. J’ai enfin pu sentir le froid sur ma peau, le froid de la neige, la chaleur autour des gens, rien que leur présence était bénie. Bref, j’ai passé une journée de bohème.
Et me voila à écrire dans ce journal qui m’a permis de réfléchir pendant cinq ans. Ah oui, j’ai vu combien de temps ça faisait grâce au journal et à la télévision. Tant de choses ont changé… A commencé que toute la ville me croit mort. Mes parents ont manifestement déménagé, je ne sais où, je n’ai pas pu obtenir d’information là-dessus, et j’ai perdu mon poste à l’Université. J’ai pu rien, ces enflures m’ont tout pris. Au moins, ils m’ont donné un logement, qu’ils ont acheté à mon nom, et assez d’argent pour quelques temps. Ca me laisse l’occasion d’enquêter sur leur identité.


Bon, ça a pris du temps, j’ai rien découvert seul, mais eux sont venus à moi. C’est les gars de Made by Mad qui m’ont capturé. Voila la petite histoire des deux derniers jours : de plus en plus, mes tempes me démangeaient, me démangeaient tellement que j’ai gratté, gratté, gratté, encore et encore, toujours plus fort pour que ça cesse ! Et ce jusqu’au sang, mais j’ai continué, ça me rendait fou. J’ai touché un truc dur, puis je me suis évanoui. Je pense que j’ai creusé jusqu’à la boîte crânienne. A mon réveil, j’étais sur un lit d’hôpital, avec l’impression d’avoir dormi des dizaines d’heures. Ce lieu me disait quelque chose, comme si j’en avais rêvé. L’air ambiant, l’odeur, les sons, tout me disait que j’étais déjà venu là, mais je n’arrivais pas à confirmer. Enfin, un gars masqué, en blouse, est arrivé dans la pièce.

« Ah, vous voila réveillé ! Ne tentez pas de vous levez, vous avez subis une importante opération au cerveau et vous sortez d’un coma d’une trentaine d’heures, si vous ne voulez pas y retourner voire mourir dans l’instant, restez bien sagement à votre place. Bien, je vous dois beaucoup de choses, Monsieur Anderson. Pour vous remercier, je vais tout vous exposer. Je suis le Docteur Saudron, responsable du projet dont vous êtes le Cobaye. Nous sommes MbM, nous sommes ceux qui vous ont enlevé, il y a cinq ans de cela. Pourquoi vous ? Votre profil était parfait. Des connaissances en psychologie, notamment en neurologie, et une condition physique parfaite, vous êtes donc en état de savoir pourquoi nous avons fait cela. Le but de cet enfermement était, bien sûr, de vous étudier, et surtout étudier vos émotions et réactions aux divers traitements que nous vous infligions, ainsi qu’aux drogues, pour pouvoir prédire comment vous réagiriez à n’importe quelle situation. Nos mathématiciens et nos informaticiens ont fait un travail considérable en se basant sur les observations de nos biologistes et de nos neuropsychologues. Grâce à d’importants calculs, nous pouvons tout prévoir de vous, Monsieur Anderson. Savez-vous ce que sont les amygdales ?

-Des « filtres à émotions », le moyen de contenir nos émotions pour les traduire en actions jugées correctes. Oh, bordel, je vois où vous voulez en venir…

-C’est une bonne vulgarisation. En effet, c’est un filtre, et celui-ci, si bien manipulé, peut apporter une matière ajoutée bien différente. Nous vous avons greffé une puce, capable de détecter vos émotions et vous dicter en conséquence comment réagir, selon la base de données dont elle est équipée. Nombre de ces réactions visent à vous préserver, car nous tenons tout de même à votre vie. Une autre bonne partie consiste à nous servir, à faire de vous un super-soldat à la solde de Mad. Vous êtes notre arme. Notre outil. Que vous le veuillez ou non. La puce dans votre crâne, elle, le veut, donc vos actes iront dans cette voie. Bien sûr, elle réagit aussi à certaines personnes bien précises, de chez MbM ou de chez Mµ, par exemple. Donc, en somme, vous avez votre libre arbitre, vous faites tout ce que vous désirez, jusqu’à ce que la puce s’active, et à ce moment là, c’est indirectement nous qui agissons à travers vous.

-Paye ton libre arbitre !

-Et pourtant, vous verrez, la puce ne s’activera que dans de rares cas… Selon comment vous vivez, bien évidemment. Bref, encore une dernière chose, nous vous avons recueilli une nouvelle fois car, comme prévu, votre corps a fait un rejet de la puce. Après quelques manipulations, cela ne devrait plus arriver, soyez tranquille. Enfin, nous y avons apporté une petite modification : jusque là, de tout ce que je vous ai communiqué, je n’ai pas ouvert la bouche. »

Et c’était vrai. Ca m’apparut soudain, comme une baffe : il était parfaitement immobile depuis qu’il m’avait « parlé ». Sa voix venait de l’intérieure de ma tête, sans passer par mes oreilles.

« La puce vous permet aussi de lire dans les pensées des autres. Il ne vous faut qu’un contact direct avec leur corps, pour qu’il y ait échange d’électrons, et rien qu’en ayant une image mentale d’une de ces personnes, ses pensées résonneront dans votre tête comme si c’était les vôtres. Considérez cette aptitude comme une radio, en sélectionnant une fréquence. Bon, je vais à présent vous laisser, vous allez vous rendormir puis vous réveillez dans votre nouveau chez-vous. Ah, j’oubliais, vous êtes maintenant un Holder de feu. Veillez à ne pas trop vite tout faire exploser. Et cherchez un maître, ou rien de bon n’arrivera. Ne me regardez pas comme ça, vous ne pensiez quand même pas que notre machine à tuer n’allait avoir que son épée pour exécuter notre jugement ? »

Sur ce, il s’en alla, et je m’évanouis. Comme prévu, je me réveillai « chez moi ». Reprenant doucement conscience, je m’effondrai sur le bureau à ma première tentative de me tenir sur mes pieds. Je tombai alors, littéralement, nez à couverture avec un livre. Une fois bien installé sur le fauteuil, je réalisai ce que c’était : « Initiation à la puce Feelings’ Reader & Reactions’ Manipulator en 298 mots ». Ils avaient osé.


Impressionné par les effets de la puce, je saisis la note, me levai, allumai la gazinière, et la brûlai avant même de me rendre compte de ce que je faisais.


Cela fait six mois depuis la dernière entrée de ce journal. J’ai pas mal évolué depuis. Tout d’abord, je me suis mis au mercenariat. Détective privé jusqu’à chasseur de prime, je vis de petits boulots comme ceci. Etant devenu un peu trop célèbre à Froënbourg pour ça (y’a des pours et des contres), je décidai de me balader dans Breath. Pour se faire, je me suis payé un étui à violoncelle, le seul truc assez gros pour contenir mon épée (d’excellente facture d’ailleurs, les gars de MbM se sont pas foutus de ma gueule), et un peu de matériel, notamment pour son entretien, des vivres, et ce journal. J’ai aussi commencé à comprendre le fonctionnement de mes pouvoirs. Ce que j’appelle le « RADIOPEOPLE » est assez instinctif à l’utilisation, mais mes pouvoirs de Holder ont été un peu plus… capricieux. D’abord, j’ai pu faire péter des trucs avec le « Fil de Gaz », ce qui est cool. Je l’ai découvert en faisant exploser ma gazinière, c’était moins cool. Et chose pratique pour les nuits à la belle étoile : je maîtrise depuis quelques semaines ce que j’ai appelé « Combustion », qui me permet, basiquement, d’avoir un feu de camp. Heureusement, la puce ne s’est encore jamais activée, mais cela dit, c’est pas rassurant non plus. En réalité, je suis assez curieux de ses effets, même si je les crains. Pour finir cette entrée, j’arrive enfin à Terraria, il fait nettement meilleur ici, y’a pas photo… Que l’adrénaline tonne dans ma puce, tout cela risque d’être intéressant !

Épée longue ∞ Dissimulée dans le double fond d’un étui de violoncelle couleur aluminium, elle est prête à servir en cas de conflit.
Fil de Gaz ∞ En claquant des doigts, fait apparaître un fil de quelques centimètres de gaz sous pression inflammable. Il peut être déposé par simple contact sur une surface. En claquant une nouvelle fois des doigts, le gaz se consume, provoquant une explosion. Un dysfonctionnement se manifeste lorsque Sylan craque : l’explosion est plus importante, mais à chaque claquement de doigts, ceux-ci se carbonisent un peu plus.
Combustion ∞ Pose une marque qui sert de combustible, pouvant ainsi alimenter un feu jusqu’à ce qu’il soit éteint ou la marque entièrement consumée. Un dysfonctionnement se manifeste lorsque Sylan craque : la marque peut être déplacée à distance mais revient comme un boomerang, alors même qu’elle est enflammée, devant être immédiatement relancée pour limiter les brûlures occasionnées.
RADIOPEOPLE ∞ Après être rentré en contact physique avec la peau de quelqu’un (donc après un échange électronique), peut « régler la fréquence », à la manière d’une radio, sur cette personne rien qu’en l’imaginant afin d’entendre ses pensées. Un dysfonctionnement se manifeste lorsque Sylan craque : il entend les pensées de toutes les personnes qu’il a touché, en même temps.