Aaron errait dans l’hôpital, cherchant une façon de passer le temps. En recherche de compagnie dans un premier temps, il avait vite abandonné cette idée, remarquant que ses rares connaissances étaient totalement indisponibles. Il décida alors de visiter les bâtiments qu’il ne connaissait pas encore. Cela devrait l’occuper suffisamment longtemps le temps que son frère puisse sortir. Il avait dans un premier temps marché sans réellement savoir où il allait finir, fouillant les urgences dans tous les recoins qui lui étaient accessibles, avant de passer dans un lieu inconnu. La maternité. Un lieu rempli de personnes qui, bien qu’anxieuses, ne pouvaient dissimuler le large sourire qui se dessinait sur leurs lèvres. Après tout, ces gens accueilleraient une nouvelle petite chose dans leurs quotidiens. On pouvait aussi entendre les cris de douleurs des femmes qui donnaient la vie. S’adossant à un mur, le blond s’interrogea. Sa mère était-elle passée par là, elle aussi ? Il avait du mal à l’imaginer tiraillé entre la douleur et la joie, non. Sans doute était-elle juste souffrante, hâtive d’en finir avec cette chose qui sortait de ses entrailles. Aaron serra le poing machinalement en repensa à sa génitrice. Elle était si loin de toutes celle qu’il pouvait voir ici, c’en était affligeant. D’un air de dégoût, il décida de partir au plus vite de cet endroit qui venait de l’énerver pour de bon. C’est ainsi qu’il percuta une personne qui devait véritablement travailler ici au vu de ses vêtements. Ce n’était vraiment pas le bon moment pour tirer de la sorte le jeune homme de ses pensées. Il toisa l’employé d’un air rageur, agacé.

- Vous pourriez pas faire un peu plus attention ?!

Juste après avoir prononcé cette phrase, Aaron se recula légèrement. Il devait être ridicule pour s’emporter de la sorte pour un fait dont il n’était pas étranger. Il aurait lui aussi pu faire un peu plus attention, non ? Et ce n’était pas le moment d’être mal vu dans cet hôpital, peu importe avec qui, sait-on jamais. Il risquait de devoir venir ici encore durant de nombreuses années, vu comme c’était partit. Il s’approcha alors du médecin, un air plus calme sur le visage, et posa sa main sur son bras droit.

- Désolé, j’aurais pas dû m’emporter… Vous vous êtes pas fait mal ?

Voilà jusqu’où pouvait aller la compassion d’Aaron en cet instant. Charmant, n’est-ce pas ?

Aaron était et demeurera pour longtemps une personne étrangement tactile. Pas forcément affectueux, non, mais très tactile. Il est persuadé que ne pas se comporter ainsi, en l’occurrence dans cette situation, ne pas avoir mis sa main sur le bras de son interlocuteur, n’aurait pas procuré le même impact à ses excuses. Jamais il n’aurait pensé que cette trop grande proximité pourrait s’avérer être gênante, déstabilisante pour certaines personnes. Non, pour lui, tout le monde pensait de la même façon. Et il est sûr que si c’était le cas, les choses pourraient être plus simples. Ne voyant pas de signe physique indiquant que son interlocuteur n’apprécie guère cette proximité, le blond laissa son bras à sa place tandis que le médecin qu’il venait de percuter s’inquiétait pour lui. Décidemment, il devait être une personne formidable au grand cœur pour continuer de penser à une personne qui venait de s’emporter contre lui quelques secondes auparavant. Ou peut-être n’était-il que très professionnel ? Néanmoins, cela arracha des lèvres du jeune homme un sourire gêné. Vraiment, ce calme et cette compassion le faisait passer pour un véritable idiot, à s’énerver ainsi pour rien.

- Non non, je n’ai rien, merci.

Il n’eut pas le temps de dire quoi que ce soit d’autre que son interlocuteur lui posa une autre question, d’ordre plus personnel cette fois-ci. En même temps, sa présence dans une maternité était des plus étranges, il fallait l’admettre. Il ne fallait pas le regarder bien longtemps pour comprendre qu’il n’avait absolument pas l’âge de se trouver là. Que devait-il lui répondre ? La vérité, un mensonge ? Quel avantage avait-il à mentir pour cette fois ? Mieux fallait dire la vérité, même s’il fallait la camoufler. Aaron n’aimait pas forcément faire étalage de sa vie privée, ne voulant pas voir les gens s’apitoyer sur son sort. Car, soyons francs, ces personnes soucieuses des autres ne sont, au final, pas préoccupé par votre sort pendant plus de trois minutes. S’ils s’inquiètent pour les autres ce n’est que pour se donner une bonne conscience, pouvoir rentrer chez eux la tête haute, l’esprit fier et heureux de cette fausse compassion.

- En réalité, je me suis perdu. J’attends mon frère qui se trouve aux urgences et pour passer le temps, j’ai voulu explorer un peu plus les bâtiments. Et, sans m’en rendre compte, je me suis retrouvé ici… Je devrais peut-être partir, pour ne pas plus déranger. Vous travaillez dans ce service ? Je suis navré du dérangement.

Il était étrangement soucieux de bien faire en cet instant, pour une raison qui lui échappait. Peut-être le fait de se trouver dans un lieu consacré à apporter la vie ? Il finit sa phrase avant de détailler un peu plus en détail son interlocuteur. Il s’attarda plus longuement sur son visage, observant cette coupe de cheveux qui camouflait intégralement un de ses deux yeux. C’était quelque chose d’autorisé pour un médecin ?