La route était logue et chiante. Je me demandais bien pourquoi la compagnie de livraison possédait un contrat avec un restaurant chic d'une autre cité. Enfin, les papiers étant signés, il fallait maintenant se rendre à destination pour livrer les paquets. De la vaisselle semblait-il... Ça semblait simple. C'était la cinquième fois qu'on allait à ce restaurant après tout. On arriva dans la cité le soir, alors que le soleil était déjà couché depuis quelques heures. On se stationna devant un hôtel, mais je ne sortis pas contrairement à mes collègues. Je n'avais pas d'argent pour me payer une chambre. Je leur ai dit de me laisser dormir dans le véhicule sans chercher à essayer d'être gentil, car j'avais pas envie qu'ils soient hypocrites. Ils ont eus beaucoup de pitié pour moi, car lorsque je me suis réveillé, j'étais dans un lit douillet, enrobé dans une couverture blanche et douce. J'avais très bien dormi, mais je ne pouvais me retenir de lancer quelques regards méchants vers mes collègues qui me disaient sans cesse que ce n'était pas grave et que je ne leur devait rien. J'ai pour habitude de profité des autres, mais je n'étais pas de cette humeur hier soir. Ni même aujourd'hui d'ailleurs. J'ai juste envie de prendre la vaisselle enfermée dans la camionnette pour la briser.

Bref, j'ai pris le temps de me réveiller avant d'aller au véhicule pour démarrer le moteur. Je me rends avec mes collègues aux restaurants. Nous allions manger à cet endroit après avoir débarqué les boîtes. Je me détournais lentement, souriant légèrement en coin lorsque je fis face à Amédo. Ce n'étais pas la première fois que le voyais.

« Ah, bonjour. Heum, oui, si tu veux. »

Je lui donne la boîte que je tenais entre mes mains même s'il ne semblait pas vraiment vouloir aider. Peut-être qu'il était en pause... Je comprendrais cette frustration.

« Tu étais en pause, hein ?.. »

Je pris quelques autres boîtes, les déposants pour faire une petite pile tout en écoutant Amédo. Je n'avais pas oublié son nom même s'il ne me l'avais jamais dit directement. Je l'ai seulement entendu tout haut, alors que quelqu'un l'avait appelé, mais ça datait de loin. Sûrement lors de la deuxième livraison que j'avais fait en ce lieu. La route m'avait semblé moins longue lors de celle-ci. J'étais peut-être en meilleur compagnie... Qui sait, j'en ai presque aucun souvenir en fait et je n'ai guère envie d'y repenser puisque c'était le genre de trucs que je préférais oublier. Je prends quelques feuilles, cochant des numéros et m’arrangeant à voir si les boîtes étaient bien noté au cas où on se serait trompé dans l'embarquement. La deuxième vérification est toujours la plus chiante. Tu as peur de te tromper, de mettre un faux numéro et de devoir chercher jusqu'à retrouver la boîte pour être certain que le paquet à bien été livré. Je soupire, détournant mon regard vers le serveur. Je souris en coin face à ses paroles.    

« Je dois admettre que je ne sais pas comment tu fais pour pas piger dans leurs assiettes... J'aurais bouffé un truc si j'aurais été toi et j'aurais sûrement été mis à la porte aussi... Bref.»

Je n'étais pas du genre à servir les gens. Surtout pas quand ça devait me nuire de la sorte. C'est là qu'on se demande pourquoi je suis livreur... La réponse est simple, j'ai une appartement à payer. Je ne sais pas ce que j'aurais vraiment fait à la place d'Amédo, mais j'suis certain qu'une assiette aurait disparue. Je donne le paquet de feuille à un de mes collègues qui passe à côté de moi. Celui-ci regarde la liste, note un petit problème puis m'ébouriffe les cheveux en prenant un air fraternel. Il me remercie au même moment, emportant les dernières boîtes pour les sortir de la camionnette et le rentrer dans le restaurant.  

« J'ai pas mangé non plus sinon... »

Je le fixe tout en fermant la valise. L'idée qu'on mange ensemble ne me déplaisait pas. J'allais pouvoir parler à quelqu'un d'autre que les gros bras qui me servait de collègues.

« On peut donc manger ensemble, si ça te va...»